UN MOMENT DE GRÂCE : se divertir dans les ratés et le chaos
Un manuel très imparfait pour connaître la Paix au bout du chemin
Prendre Soin de Soi en Respectant le Hasard… (édito)
J'ai plaisir à venir ici vous raconter mes petites anecdotes , mais je sens que si je continue comme ça, je vais vous perdre. Ou on va se faire du mal. Car qu'avons-nous appris jusqu'ici en lisant LE CABINET ?
Primo Levi, pas grand chose en vrai. Et deuxio maléfique, je vous ai surtout parlé de pauvres cinéphiles devant binge-watcher jusqu'à la mort des séries (NB: j'ai presque fini la saison 12 de South Park et je suis encore dans les temps), ou encore de santé mentale défaillante, ou de gens complétement détraqués et fortement hystérisés...
Il faut que ça cesse.Je dois vous/nous préserver. L'heure est à l'apaisement, chers amis. C'est pourquoi j'ai choisi pour vous 3 films feel-good.
THEY CAME FROM BEYOUND SPACE de Freddie Francis (UK-1967 ): un pull, une pipe, un talus…
Tout ce passait bien, dans la campagne anglaise des années 60, quand tout à coup, des lumières se sont mises à scintiller dans le ciel puis à se rapprocher en vol quadrillé. Ce sont des météorites.
Ça tombe bien car Robert Hutton (qui fera plusieurs films avec Freddie Francis) est chercheur dans un observatoire non loin de là. Il aimeraient bien aller avec ses collègues observer ces météorites, mais il n'a pas le droit -doctor's orders- car il a une plaque de fer dans la tête suite à un accident. [Si si… Arrêtez de tout contester s'il vous plait. Il a une plaque en fer dans le crâne et c'est tout.] Ce n'est pas grave: c'est Jennifer Jayne sa jeune collègue et néanmoins petite amie qui ira sur place.
Mais au fil des jours les collègues de Robert demandent de plus en plus de matériel, des fusils, de l'argent. En plus ils refusent de communiquer leurs recherches et de répondre au téléphone !
C’en est trop ! Quelque chose ne tourne pas rond, et Robert décide d'aller y jeter un oeil, plaque en fer dans le crâne ou pas !
Moi, les anglais, je les adore. C'est mon point faible. Ils ont des super voix, ils sont beaux, ils ont l'air intelligent et en plus ils sont drôles. Le Flying Circus, c'est eux. Robert Wyatt, c'est eux. Le Prisonnier, c'est eux. Et sans eux, point de Jim Henson !
En plus, dans ce film règne un petit air de CHAPEAU MELON ET BOTTES DE CUIR, plus belle série du Monde. Ces petites routes de campagne, cette voiture de collection vintage que conduit sans cesse Robert Hutton (il fait beaucoup d'aller-retours pendant le film, ça en devient fatiguant !). Et puis, comme dans CHAPEAU MELON..., il y a du mystère, du fantastique, des complots et une gentille atmosphère de paranoïa. Moi, je suis déjà conquis.
Aux manettes, c'est palace avec Freddie Francis, réalisateur anglais comme on s'en doute, mais aussi grand directeur de la photo. ELEPHANT MAN, c'est lui. On le trouve chez Scorcese également. Et surtout, c'est lui qui a photographié un des plus beaux et des plus fous films de l'histoire: l'ultra-moderne LES INNOCENTS de Jack Clayton. Si vous n'avez pas vu ce film, faîtes vous ce cadeau, voyez-le sur le champs, et cessez de lire cette newsletter.
Et pourquoi je vous raconte tout ça ? Et bien, un peu pour rien, un peu en vain. car, on ne peut pas dire que THEY CAME FROM BEYOUND SPACE soit passionnant. Si l'intrigue est simple, la narration est souvent laborieuse. Le budget est très serré (ce n'est pas un problème pour moi, ohoh) et les situations tentent à se répéter fichtrement. Si les acteurs sont relativement chouettes (dont une Zia Mohyeddin fort sympatoche en garagiste qui sait ce qu'elle veut), on ne peut pas dire que ça respire la folie, même douce. Car le bât blesse du côté du scénario qui réussit le difficile cocktail consistant à mélanger le Prévisible avec le Confus. Plus on avance, plus cela semble avoir ni queue ni tête. Et lorsqu'on découvre en fin de parcours l'excellentissime Michael Gough en Roi de la Lune, nous sommes déjà à moitié en train de dormir. Quand à Freddie Francis, à ce stade, il ne semble pas vraiment trop savoir où il en est. La dernière minute du film, carrément (wait for it) "lunaire" (rires enregistrés), laissera tout le monde perplexe que ce soit dans la salle ou sur le plateau de tournage.
A moins que vous soyez un hyper-fan de sf de l'époque ou que la simple vu d'un talus sur un bord de route en Cornouailles anglaises représente pour vous le summum de l’excitation érotique (et sachez-le, c'est mon cas), on peut gentiment, sans se fâcher, passer son tour. Et si vous voulez voir un Freddie Francis sublime, rabattez-vous plutôt sur le merveilleux et bouleversant LA CHAIR DU DIABLE.
Et maintenant quelque chose de complétement différent...
DR WHO CONTRE LES DALEKS (Dr Who and the Daleks) de Gordon Flemyng (UK-1965): un jésuite vaut mieux que deux tu-l’auras.
Alors, pour éviter de se fâcher, car je sais que les fanzouzes du Docteur ont la tête près du bonnet (#KissyKissy), sachez que je suis pas du tout familier avec l'univers Dr Who. J'ai vu quelques épisodes de l'époque Moffat (un p'tit gars que j'aime bien d'ailleurs, même sa série DRACULA) et c'est a peu près tout.
Mais comme on était stationné en Angleterre et dans les années 60, je me suis que cette comédie d'aventure SF familiale ne nous ferait pas de mal.
Le fantasque Dr Who (Peter Cushing dont un des plus beaux rôles est justement dans LA CHAIR DU DIABLE de Freddie Francis dont je viens de vous parler), accompagné par ses deux petites filles (la jeune Roberta Tovey et la grande Jennie Linden) fait visiter au fiancé de cette dernière sa dernière invention, le Tardis, que vous connaissez forcément même si vous ne connaissez rien à la licence, car il s'agit de la fameuse cabine téléphonique bleu de police qui permet de voyager dans le temps et l'espace !
Hélas, le fiancé est du genre goofiesque et malencontreusement, il enclenche le démarrage de la machine ! Voilà notre quatre héros arrivés sur une planète inconnue et fortement radioactive, à une période inconnue. En explorant la zone ils découvrent une ville et ses étranges habitants robotisés: les daleks !
Évidemment, après un THEY CAME FOR BEYOUND SPACE assez laborieux et dépourvu de moyens, passer à ce DR WHO…se fait avec un certain soulagement et, encore plus, avec une facilité remarquable.
Déjà, on est accueilli par un Peter Cushing classique mais facétieux qui ne boude pas son plaisir et dont on sent ici qu'il est en vacances et compte bien en profiter.Bon point.
Le reste du casting est plutôt sympatoche et même la jeune Tovey n'est pas trop énervante avec ses sales couettes et ses airs de premières de la classe.
Les décors ne sont peut-être pas si nombreux mais ils installent une atmosphère assez sympas aussi. C'est bien éclairé avec de jolies couleurs et tout et tout. Comme la réalisation n'est pas trop laide non plus, on suit sans déplaisir cette aventure pourtant fort simple et dont les lignes sont toutes tracées. On découvre aussi les Thals, race pacifique ennemie des daleks, personnages plus figés mais qui donnent lieu à quelques échanges rigolos entre eux et Cushing qui aimerait bien les pousser à la violence et à la défense du territoire !
Tout cela est fort chatoyant et relativement cosy mais pour profiter du spectacle il faudra (les whozouzes, bouchez-vous les oreilles) passer outre les voix monocordes, grésillantes et robotiques des daleks qui rendent parfois un chouïa pénibeules (comme on dit dans la langue de Cyndi Lauper) la progression de l'intrigue.
Je dois ajouter un note tout à fait personnelle dont vous ne tiendrez ni compte ni rigueur. Dans le rôle du fiancé, on trouve le joyeux luron Roy Castle. Et bien que le bonhomme soit -relativement- sympathique, il m'a bien sorti du film, l'animal !
C'est homme est le sosie parfait de Gaël Giraud, économiste, ex-trader, prêtre jésuite, ceinture noir de karaté et challenger au jeu League Of Legends. Un homme que j'aime beaucoup. [Très didactique mais précis, et menant une recherche croisée sur l'économie, la crise écologique et la crise sociale, c'est passionnant et souvent brillant).
Pendant tout le film, je me suis demandé si il allait parler à Peter Cushing des actifs bancaires bruns ou des leçons non-tirées de la crise financière de 2008. Je me suis aussi demandé si on avait déjà vu Giraud et Roy Castle dans la même pièce. Et à la fin, je n'en pouvais plus de me demander pourquoi Giraud avait accepté le rôle de ce petit gars un peu peureux et très maladroit !
C'était une expérience plutôt originale mais qui m'a gentiment sorti du film. Ce DR WHO.. n'est pas un chef-d'oeuvre intergalactique, certes, et il ne prétend pas l'être et j'imagine que sans mon obsession pour mon pote jésuite, le film aurait tranquillement fait le taff. Et s'il y a des fans du Docteur dans la salle, j'ai hâte d'avoir vos retours sur ce film gentiment sympatoche, Patoche.
Puisqu'on parle de vous, très cher public du CABINET, laissez-moi vous dire merci-non-merci à l'un d'entre-vous qui m'a donné -sale traître !- l'envie de revoir...
TEAM AMERICA de Trey Parker (USA-2004)
Soit maudit, gentil lecteur qui commenta un précédent article ! Moi le pauvre larbin qui est train de binge-watcher 24 saisons de South Park au détriment de ma vie familiale et de ma santé mentale (j'explique ça ici), me voilà frôlant l'overdose en revoyant ce TEAM AMERICA que je n'avais vu qu'à l'époque et en salle.
Je ne vais pas m'attarder sur le film car j'en avais déjà parlé il y a vingt ans (humm humm) sur feu le site Matière Focale. Pour lire la critique: cliquez ici. En plus, pour une fois, la critique est pas trop longue et très claire !
En tout cas, revoir le film a été une joie sans nulle autre pareil. Je réitère le compliment que je faisais déjà à Parker et Stone lors de mon gavage South Park : le propos est tellement brillantissime que rien n'a vieilli ou presque. Tout se tient encore, tout est pertinent. Tout semble avoir été écrit ou réalisé la semaine dernière.
Et pour ce nouveau visionnage j'ai été frappé par l'incroyable soin (et le gros paquet de fric!) apporté au film. Marionnettes, effets spéciaux, décors, miniatures, tout est sublime ! Notamment la photo signée Bill Pope. Et tout passe par la mise en scène, le propos est d'une violence hallucinante mais toujours extrêmement juste.
Je crois qu'on peut parler de chef-d’œuvre. Si le film n'était pas une comédie, et si la réputation des créateurs n'étaient pas si sulfureuse, la question ne se poserait sans doute pas. Je vous renvoie donc à ma vieille critique de l'époque qui vous revient notamment sur l’accueil du film, vous allez voir, c'est quelque chose!.
Et je vous assure que revoir TEAM AMERICA, le jour de l’élection de qui vous savez m'a collé un frisson, une rage et un espoir complétement dingues !
Étonnant, non ?
Il est bien temps pour moi de vous libérez.
Prenez soin de vous.
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La bise.
Dr Devo.